MES BLOGS ONT 20 ANS- ÇA SE FÊTE

  J'avais commencé à publier des recettes du terroir bônois et du quotidien assez tôt.   Pas de recette aujourd'hui, mes 4 blogs et mon site Google sont en fête. Il y a 20 ans en arrière, j'avais commencé à publier des recettes de mon terroir et de mon quotidien. Des coups de cœur de la cuisine du monde et de mets que je découvre chez les copines. Le 02 février 2004, j'avais débuté sur mon site cuisine orientale fermé à présent et dont seuls les membres y ont accès, j'y postais des recettes avec ou sans image ( les photos n'étaient pas obligatoires ), le wifi à la maison n'existait pas encore, la connexion se faisait via Algérie télécom, je me connectais pour une heure ou deux après le souper, les révisions de mes enfants et une fois les Piou Piou au lit, je me connectais et je publiais ce que je réalisais la journée, cela pouvait aller jusqu'à 2 à 3 posts par jour parfois et parfois rien. Il fallait que je fasse vite avant la fin de la connexion. Il n&#

3arboune ou aarboune, us et coutumes bônoises



El 3arboune , 3arboune ou aarboune, cérémonie rituelle, inédite , un vécu que je relate jamais révélé sur le web,  célébrée annuellement  par les autochtones bônoises, un vécu du temps de mémé Hnaifa , femme charismatique et fervente détentrice des us et coutumes sans conteste . une cérémonie rituelle grandiose , célébrée encore de nos jours exceptionnellement.
Parfois il arrive que l'on organise une petite cérémonie en attendant de préparer l'essentielle.

3arboune, littéralement acompte dû, un rituel dont on doit nécessairement s’acquitter par crainte de se voir atteint de crises inexplicables

Si on sait que les femmes d'antan ne pouvaient s’extérioriser ni sortir librement pour se défouler, elles développaient des manifestations psychiques ou hystériques spectaculaires qui obligent l'entourage proche d'organiser ce 3arboune, car c'est un rituel bien ancré dans les habitudes et croyances d'alors !
Le aarboune est considéré comme une espèce d'échappatoire aux contraintes des bônoises qui se trouvaient en état de mal être et d'où résultent des crises que l'on incombait aux djins qui habitent la personne ( moussaba )

Le 3arboune est aussi une cérémonie fastueuse où les invitées sont vêtues de leurs beaux apparats, bijoux en or, les repas sont riches, pâtisseries traditionnelles à base de noix et amandes ( baklawa, makrouk, ghrayba généralement )

Devant ces manifestations, les proches se trouvent dans l'obligation de procéder au rituel d'exorcisme
cependant, lorsqu'il s'agit de femme mariée, il n'y a aucun souci à organiser un aarboune, par contre pour une jeune fille, c'est plus délicat et la cérémonie se passe en huis clos et est tenue secrète de peur que la fille ne trouve de bon parti pour se marier !

devant L'état de la malade, la famille fait appel à la chef des fkirettes ( raissa ) pour entamer la procédure de l'exorcisme, pour cela elle procède à un rituel dit de tedwar ( dawer el moghrof ) qui consiste à envelopper le manche d'une cuillère en bois d'un foulard et en le tournant au dessus de la tête de la malade ( moussaba ) en faisant des incantations , lorsque le foulard tombe on saura le nom du djin responsable

suite à cela, une pièce de monnaie est enveloppée dans un foulard qui sera aussi tournée 7 fois au dessus de sa tête et qui sera gardé sur la moussaba, comme gage et acompte , une promesse pour régler un dû au plus vite.

commencent alors les préparatifs pour le 3arboune
les fkirettes retenues, orchestre féminin
les achats fait, tels que mouton, volaille pour les repas,
 nécessaire pour pâtisserie

Préparation de el madda, ou harkous éphémère à base de produits spécifiques cuits dans une zlaizia, cette madda est utilisée pour les mariées, les moussabettes et les saintes de la ville de bône, telles que lalla morra, lalla bouna, lalla khroufa, lalla r'hila, ayn bent essoltane, ayn achir

composition de el madda et préparation
3afss, gale ( plante , baie)
clou de girofle
jéwi, benjoin
hdida, oxyde de fer
tafoul, argile de bain
sissane, pierre argileuse utilisée aussi pour effacer les ardoises ( lawha ) école coranique
swek, écorce de noyer

à placer dans la zlaizia, le 3afss, jeoui, clou de girofle, swek
sur la face intérieure du couvercle , on frotte
le sissane et le tafoul généreusement
on couvre la zlaizia, suite dans un prochain article

les invitations déléguées avec une messedna, femme très respectée qui se charge des invitations et de la cuisine

le transport réservé ( c'était des diligences à l'époque, kraress )

tapis, matelas et coussins

tous les ustensiles nécessaires pour la cuisine
ceux pour servir

skemlettes ( tréteaux ) sur lesquelles on pose les grands plateaux en cuivre ( sinyettes )

tenue complète bleu ciel en soie ou en satin pour la moussaba


Tôt le matin et avant l'aube, on prend le chemin de ras el hamra ( haut lieu de culte à bône ), pour commencer les installations , car on est en camping, il faut placer la lumière, placer les tapis et matelas pour accueillir les invitées qui arrivent l'après midi, la cérémonie du 3arboune commence après le dîner, tout se passe dans bait el caid , vaste grotte de culte .

démarrer les repas, préparer le café , on prend notre petit déjeuner sur place, souvent on prend des ftayers sur le chemin, le lait est sur place car le gardien des lieux élève du bétail, c'est une région assez montagneuse

les adultes vaquent à leurs occupations , nous enfants on partait à la découverte des lieux accompagnés de notre grande tante ou maman qui gardaient un œil sur les préparatifs, on visitait les lieux culte en y apportant des cierges, madda, du pompeia et de l'encens avec des snejaqs ( étendards ) dont on couvrait les tombeaux ou mausolée , henné , tels lalla r'hila, ayn bent esoltane, sidi nawr, sidi abdelkader....

puis on déjeunait
les fkirettes et les invitées commençaient à arriver, lorsque tout le monde est là , elles procédaient au mdih de dakhla et en l'honneur du lieu de culte

puis un après midi de danses et amusement continuait jusqu' à l'heure du café  où sont servis café et gâteaux à tous.

le dîner est servi tôt avant le coucher du soleil, une fois tout rangé , commence alors la cérémonie du 3arboune

elle se fait le soir lorsqu'elle est organisée à rass el hamra , si elle se déroule à domicile, c'est juste un café avec des gâteaux, le 3arboune se fait directement pour que tout le monde puisse rentrer !

à ras el hamra, les gens préfèrent passer la nuit sur place et rentrer le lendemain

je dois noter aussi que les jeunes filles n'assistaient pas au 3arboune de peur qu'elles ne soient " habitées de djin "
les jeunes épouses ne portent pas de rose non plus, on dit  "qu'elles pourraient plaire aux djins qui les prendraient pour épouses  et seraient habitées ", bon je rapporte tous les détails hein !!!!!

lorsque tout est rangé, la moussaba est installée sur un beau coussin en face des fkirettes, sous les effluves de l'encens , wchq et ded jetés sur les braises d'un brasero ( canoun bkhrour ) 

Quelques jours avant idawroulha el moghrof w yorbtou une pièce de monnaie en guise de bonne foi faite aux jnouns sur un coin de foulard qui servait de tekrita,

 cette pièce servira parmi l'argent aux dépenses du Aarboune , les invitées derrière et autour, vêtue de sa tenue faddi et foulard posé sur la tête en guise de voile tombant, on lui aurait mis du henné la veille et préparé la madda à l'avance pour le harkous au lieu culte et la khana que l'on applique sur la joue ou le coin du menton des invitées, accompagnée de khalti Rmeki . 

Commencent alors les incantations, invocations et implorations à Dieu pour commencer, ( le3ded ) par la raissa et aux djins et wleyillah, les implorant de quitter le corps de la malade qui commencent à entrer en transe sous les bruits des bendirs, des chants rythmés impressionnants , puis prise de saccades en quelque sorte et tombe affalée au sol, on lui fait boire le cherbet, boisson des moussabines faite de ma'zhar et sucre ( eau de fleur d'oranger sucrée ), 
elle se réveille libérée des djins, la cérémonie continue bel mdih et toutes les moussabines présentes se libèrent aussi , ibardou jnounhom . Avant la cérémonie du aarboune, l'après midi se déroule fel haz maa sghar , un après midi convivial, hlou w cahwa, chweb mdadlines , dhab , kar w khounar, 

j'ai assisté des années durant fi 3rabenes grand mère hnaifa bent Hmayoud w khédija bent el Oki, Horia Chaker, cousine à maman et Farida Farès née Berzane , petite fille  Zoubaiba Chaker tante à maman, khalti Badiaa bent el matmati et sa maman, ,née Garadelli cousins et cousines germaines de grand père Tahar  Riffi et khalti Rmeki, c'était de grandes moussabines de ma famille paternelle et maternelle, mémé Hnaifa organisait ses aarabenes à la maison et à rjel el hamra, un vécu superbe qui ne se refera plus hélas.....

Touféha


lorsque tout le monde dort, ( tosquot erjel )
Un plateau aura été préparé comportant des petites soucoupes pleines de de bonbons, dragées, benjoin, henné, flacon de parfum, touféha, bougies allumées, 3oud kméri, des roses, jasmins que
Khalti Kmeki ainsi que celles qui désirent accompagner la moussaba chez lalla rhila, pour répandre au large du haut de la falaise la touféha
touféha, offrande faite aux djins habitant la mer et les terres, faites de semoule et de miel dont ils raffolent dit on !
La touféha est répandue au large du haut de la falaise ainsi qu'autour , les lieux sont aspergés de lotion pompeia, on jette les dragées et bonbons à la mer et autour sur les terres ainsi que les fleurs et encens.
 C'est à ce moment que sortent les djins pour savourer la touféha et libèrent la malade !

Puis tout le monde se couche, au petit matin les membres de la famille se lèvent tôt pour préparer le petit déjeuner, les hommes de la famille descendent apporter les beignets ( ftayers ), et le lait,  tout le monde se réveille et prend son petit déjeuner accompagné de gâteaux et de ftayers, puis les hommes commencent à emballer les affaires et par la suite , on prend le chemin du retour satisfaits!
Sur notre chemin on descend saluer ain achir avec de l'encens, cierges, parfum , madda, henné et dragées, on s'arrêtait aussi pour poser des fleurs et des dragées à Ste Vierge sur notre chemin et go à la maison où un gros travail de rangement nous attend.

La touféha, un mélange de semoule et de miel que l'on doit maintenir couverte et à l'abri des regards, afin d'éviter la colère des jnouns

pompéia, très ancienne lotion importée de France utilisée par les moussabines



tgarguib el moghrof, l'action de rouler un foulard autour d'une cuillère en vois et la tourner en mouvements circulaires autour de la la tête des malades pour tenter de démasquer le djin responsable des crises ou maladies !!

Ma fille me dit qu'il doit y avoir une explication scientifique à ce phénomène de foulard roulé qui tombe.
Voilà la différence entre sa génération et la mienne qui gobions tous!





tedwar, ndawrou lefranc, agiter ou tourner une pièce de monnaie sur la tête du malade pour promettre de s'acquitter d'un dû rituel

skemlette ou squemlette, sorte de tréteau



sinia nhass, grand plateau en cuivre, rouge, jaune ou blanc

madda, harkouss, tatouage éphémère fait maison, extrêmement rare de nos jours, chez moi , on le fait toujours et son odeur est délicieuse, photo ci dessus

moussaba, moussabines, habitées par un djin

jnoun, pluriel jin

Bait el caid, haut lieu de culte, très vaste grotte !!

Voilà, j'ai tout rapporté de mon vécu sur 3arboune, on a nos croyances comme tous les peuples du monde et les civilisations aussi émancipées soit elle !


La dernière descente à ain bent esoltane fut en 1988, plus tard toute la zone avait subi un chantier qui a tout saccagé sur son chemin



Commentaires

  1. Merci beaucoup Zika de nous partager tes traditions, c'est très enrichissant. Bonne soirée et gros bisous

    RépondreSupprimer
  2. merci pour le partage des coutumes bônoises , bonne soirée et gros bisous

    RépondreSupprimer
  3. que de belles choses tu nous apprend de ton cher pays avec toutes ces coutumes
    très bonne soirée bises

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Elles tendent à disparaître de nos jours, on ne vit plus comme nos ancêtres, quelques vieilles familles, leurs descendances tentent de perpétrer tant bien que mal, personne ne sait plus rien sur nos anciennes traditions, j'essaie de relater des faits ayant existé jadis du vivant de grand mère. En tout cas nos enfants ne savent rien de tout ceci et ils se désintéressent totalement, des faits vécus que je relate pour l'histoire .

      Supprimer

Enregistrer un commentaire